Maisons forestières de la forêt de Fontainebleau : que vont-elles devenir ?

Que se passe t-il avec les maisons forestières qui ponctuent encore les lisières de la forêt de Fontainebleau ?

Autrefois, les Eaux et Forêts puis l’Office des Forêts y logeaient leurs techniciens, maintenant appelés chefs de triage. Mais cette époque est révolue. Voyant que l’ONF avait des difficulté financières, l’Etat a décidé de vendre cette partie de son patrimoine. Et figurez vous que c’est un certain Cahuzac, qui a signé le décret pour la mise en vente progressive de la plupart des maisons forestières. Oui vous vous souvenez en 2012-2013, Jérome Cahuzac, le ministre du budget de François Hollande qui jure qu’il n’a pas de compte en Suisse et qu’il a donc bien payé tous ses impôts. Mais ça c’est l’anecdote. Car derrière, il se posait à l’époque une question de financement des dettes de l’ONF. Sachez que jusqu’en 2021, l’endettement de cette administration forestière s’élevait à près de 400 millions d’euros (rapport de la cour des comptes). Le déficit a été ramené à 271,3 millions d’euros en 2023, avec plus de cent millions versés par l’Etat). Mais depuis dix ans, une politique de ventes de petites forêts à des collectivités locales ou à des particuliers a été lancée. Mais aussi de nombreuses cessions d’actifs immobiliers comme les maisons forestières. Et c’est le cas pour la forêt de Fontainebleau. Depuis trois ans environ, une politique d’achat des maisons forestières a été entamée par la ville de Fontainebleau et l’interco du Pays de Fontainebleau. But, créer un réseau d’accueil du tourisme pour la forêt, pour donner de l’attractivité à la forêt et mieux organiser l’offre de loisirs. Douze maisons étaient à vendre : Grand Veneur, La Solle, Samois-Courbuisson (2), Obélisque, Macherin, Barnolets, Maintenon, Ury (2), Bourron, Garenne Gros Bois (Moret). Déjà quatre ont été achetées : celle de Maintenon (face au château-D606) par la ville et trois autres (Macherin, Grand-Veneur et Courbuisson (ancienne léproserie). Pour lancer ce projet, l’interro a fait appel à un ingénieur du tourisme, le Maître du Rêve, qui avait déjà réalisé une enquête sur le développement du tourisme en forêt de Fontainebleau. Cela s’intitule : « étude de faisabilité de requalification des maisons forestières dans une optique de développement et d’attractivité ». Elle a coûté 39 000 euros. Pour Pascal Gouhoury, président de la communauté de communes du Pays de Fontainebleau, « il s’agit d’abord de voir si un bilan économique positif est possible dans une éventuelle gestion de ce réseau de maisons forestières. On devra après trouver le ou les acteurs qui pourront nous aider à monter ce projet et faire vivre ces maisons et les activités prévues dans ces enceintes. On prévoit en moyenne un coût d’investissement (restructuration et aménagement) de chaque maison forestière pour un million d’euros chacune. » Sachant que 650 000 euros ont déjà été dépensés pour l’achat de 4 maisons.

Le budget prévisible est donc conséquent s’il dépasse les 11 millions d’euros !!! Déjà des contacts ont été pris avec la Société d’Economie Mixte d’Ile de France, section tourisme, la caisse des dépôts. L’étude vient d’être présentée voilà quelques jours aux représentants de l’ONF, les Domaines, l’Etat, les élus. Puis on en a reparlé ce mardi 1er avril dans le cadre du label forêt d’exception. L’étude, nous l’avons consulté. Elle est très détaillée. A chaque maison, une destination où l’on pourra installer des gîtes de groupe, gîtes de charme, haltes équestres, haltes vélos, halte vans, hébergements insolites, salon de thé. Dans l’étude, on parle de 30 euros la nuitée pour un gîte de groupe mais on grimpe à 190 euros en gîte de charme. Mais voilà il semble que la gestion de ces maisons forestières reste à défricher. « Il faut tout remettre à plat. Par exemple, pour la maison forestière de Macherin. Quand on on regarde sur le cadastre, on s’aperçoit que le terrain acheté déborde sur la route ! Autre point important, la moitié de la parcelle acquise doit être rendue à la forêt » indique le pdt Gouhoury. Statut de forêt de protection oblige. Oui on répondra qu’il serait normal que le massif ne soit pas de nouveau grignoté par l’urbanisation des terrains des maisons forestières. Et pourtant, on vient d’apprendre que la mairie de Fontainebleau voulait faire un grand parking dit de relais, au carrefour de la Libération. En site classé et à deux pas d’une RBI!!! Et on continue à brandir un futur label UNESCO pour un patrimoine que l’on veut de nouveau découper en lambeaux. CQFD.

Le projet de mettre les maisons forestières en réseau est au départ une bonne idée, pour un meilleur accueil du public. A condition que cet accueil soit très contrôlé. Par exemple, notre association n’est pas opposé à l’accueil de vans, à l’hippodrome de la Solle. Pour l’instant c’est toléré. Dimanche dernier, nous avons constaté qu’une dizaine de vans, en majorité d’étrangers européens étaient stationnés sur place. Avec également des tentes dressés sur le bivouac implanté tout à côté. Problème, des familles s’amusaient dans la réserve biologique intégrale située à quelques mètres. Alors acceptez 10 ou 20 vans maximum ok. Mais avec un cadre précis : pas de bruit, pas de musique, avec un gardien sur place. Le risque de ce projet est de perturber une fois de plus la faune et les nichées d’oiseaux ou de la grande faune, à partir de mars. Car on sait maintenant que le printemps a un mois d’avance. Le miroir aux alouettes du développement du tourisme ad vitam ne respecte en rien l’intégrité des écosystèmes de la forêt de Fontainebleau. On n’arrête pas de brandir que la biodiversité est prioritaire dans le massif et on ne cesse de la piétiner : création de circuits VTT Trail, multiplication des manifestations en forêt, sites des chaos rocheux sacrifiés sur l’autel de la magnésie.

Apparemment, on a le droit de se rassembler jusqu’à 60 personnes, sans autorisations. L’ONF indique qu’elle doit faire face à environ 800 demandes par an. Au dessus de 60 personnes, il faut verser 150 euros de frais de dossier.Tout le monde est loin d’être d’accord sur la multiplication de ces rassemblements. Mais revenons aux maisons forestières. Sur les tableaux de financement que nous nous sommes procurés, on voit que les coûts calculés de rénovation des maisons forestières sont très élevés. Pour celle de la Solle, d’ailleurs inscrit aux Monuments Historiques, c’est 463 332 euros, pour celle de Maintenon, c’est 680 805 euros….Est ce que ces maisons forestières, équipées et offrant plusieurs prestations seraient rentables. Oui d’après l’étude . Mais dans la réalité ? Une fois de plus le danger de faire de la forêt de Fontainebleau, une forêt dite d’exception, un parc d’attractions. Notre association a tiré le signal d’alarme sur ces menaces qui mettraient encore en danger l’intégrité du massif. Dans le même temps, il se murmure que les routes où la vitesse étaient limitées à 80 km/h en forêt repasseraient à 90 km/h. Nous le disons et fort, la traversée de la forêt via les ex Nationales et autres départementales et route Ronde doit se faire dans l’apaisement. Nous réclamons la mise à 70 km/h de l’ensemble des routes du massif. Et à minima de l’ensemble de la route Ronde !

Pascal Villebeuf, président de Sauvez la Forêt de Fontainebleau

Vice-pdt de la fédération de défense des forêts d’Ile de France (Appel des Forêts).